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Antigone (-442)

© Christian Carat Autoédition

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Le temps perdu

Le temps gagné

Parodos

Acte I : Origines

Acte II : Les Doriens

Acte IV : Alexandre

Acte V : Le christianisme

Acte III : Sophocle

Dans notre étude du personnage d’Antigone, nous évoquons un dithyrambe aujourd’hui perdu composé par Ion de Chio, contemporain et ami de Sophocle, racontant comment Ismène est morte avec Antigone dans un temple d’Héra incendié par Laodamas le fils d’Etéocle, et nous soulignons à quel point cette image d’Antigone et d’Ismène tranche avec l’image d’Antigone et d’Ismène que propose Sophocle dans son Antigone.


En abordant l’étude du personnage d’Ismène, nous éprouvons le besoin de dire que la version de l’histoire d’Ismène par Ion de Chio ne semble pas moins étrangère à la tradition antérieure que celle de Sophocle.


Au Ier siècle en effet, l’auteur romain Stace écrit une Thébaïde fondée sur l’ancienne Thébaïde du VIIIème siècle av. J.-C. aujourd’hui perdue. Dans cette œuvre, Stace révèle que quand débute l’assaut des Sept contre Thèbes, Ismène est fiancée avec un nommé Atys de Cyrrha, avec lequel elle file le parfait amour, mais la guerre des Sept met un terme à cette romance : en colère contre les Sept qui l’empêchent de conclure son mariage avec Ismène, Atys monte à l’assaut de façon inconsciente ("Promis depuis son enfance à une princesse du sang d’Agénor, à la jeune Ismène, Atys s’avance dans la mêlée. Quoiqu’il ait Cyrrha pour patrie, il n’est pas pour les Thébains un auxiliaire étranger, car les crimes de cette triste famille n’ont pu le détourner de s’unir à elle par une alliance. Sa chaste douleur, le deuil immérité de son amante la rend encore plus chère à son cœur, il est beau lui-même, et la jeune vierge partage son amour. Si la fortune ne s’y fût opposée, un heureux hymen les eût unis, mais la guerre ne permet pas d’en allumer les flambeaux, c’est là ce qui enflamme encore sa haine contre les ennemis. Le jeune guerrier s’élance au premier rang et tantôt à pied il moissonne de son infatigable épée les bataillons de Lerne, tantôt debout sur son char, les rênes à la main, il les chasse devant lui", Stace, Thébaïde VIII.554-564) et tombe bientôt sur Tydée qui le blesse mortellement en moins de temps qu’il ne faut pour le dire ("Bientôt Atys ose s’attaquer à Tydée lui-même, dont il ne connaît pas la valeur et qu’il mesure à sa taille seule. Il provoque de son épée fragile celui qu’on voyait sans cesse, terrible, menacer les uns ou poursuivre les autres. Tydée tourne par hasard les yeux vers son faible ennemi, et avec un sourire effrayant : “Je vois bien, malheureux, que tu désires t’illustrer par une belle mort”. Il dit, et ne jugeant pas ce jeune téméraire digne de son épée ou de sa lance il ouvre les doigts et laisse tomber sur lui un javelot sans force : le trait cependant pénètre jusqu’au fond de ses entrailles, comme s’il avait été lancé avec la plus grande vigueur. Le fils d’Oenée passe devant sa victime expirante et dédaigne sa dépouille : “Non, je ne te l’offrirai pas, ô Mars [équivalent romain du dieu grec Arès], dit-il, ni à toi, belliqueuse Pallas [Athéna], je rougirais de la porter. A peine, si Déipyle [femme de Tydée] eût quitté son palais pour m’accompagner dans cette guerre, à peine oserais-je la lui offrir comme un jouet”. Il dit, et son courage l’entraîne à de plus grands exploits : tel un lion rassasié de carnage passe à côté des jeunes taureaux, des tendres génisses, il brûle de se baigner dans le sang d’une plus noble proie, c’est le puissant roi d’un troupeau dont il veut courber le front superbe", Stace, Thébaïde VIII.577-596), Atys est ramené agonisant dans Thèbes et rend son dernier souffle dans les bras de sa bien-aimée Ismène ("Tout à coup, le palais jusqu’alors tranquille retentit d’un effroyable tumulte. On rapporte le corps d’Atys, arraché avec peine des mains de l’ennemi, qui épuisé de sang conserve encore un reste de vie. Sa main est posée sur sa blessure, sa tête retombe languissamment hors de son bouclier et ses cheveux en désordre sont rejetés en arrière. Jocaste, la première, l’aperçoit, et d’une voix tremblante elle appelle sa chère Ismène car c’est la seule grâce qu’implore la voix mourante de son gendre, c’est le seul nom qui erre sur ses lèvres glacées. Les femmes poussent des cris de désespoir. La jeune vierge s’apprêtait à lever les mains pour se meurtrir le visage, mais une sévère pudeur la retient. Elle est contrainte d’avancer, Jocaste accordant cette dernière faveur au guerrier qui expire, elle lui montre Ismène. A ce nom, quatre fois il entrouvre ses yeux éteints et soulève sa tête défaillante. C’est elle seule qu’il regarde, indifférent à la lumière du ciel, et il ne se rassasie pas de contempler son visage bien-aimé. Comme il n’a pas de mère près de lui et que son père repose dans la paix du tombeau, c’est à sa fiancée que l’on confie le triste devoir de lui fermer les yeux. Alors enfin, quand elle est sans témoins, elle donne un libre cours à ses tendres gémissements et baigne de larmes le visage de son amant", Stace, Thébaïde VIII.636-654). Dans son Histoire mythologique aujourd’hui disparue, citée par le scholiaste anonyme du vers 53 des Phéniciennes d’Euripide ("[Œdipe] épousa sa mère sans le savoir, le malheureux"), Phérécyde de Léros ajoute qu’Ismène a été tuée à son tour par Tydée près d’une fontaine qui par la suite a porté son nom.


Mais surtout, les archéologues ont mis à jour le vase du VIème siècle av. J.-C. reproduit ci-contre qui, prolongeant le témoignage de Phérécyde de Léros, montre Tydée s’apprêtant à tuer Ismène : ce vase est autant en contradiction avec l’Antigone de Sophocle qu’avec le dithyrambe d’Ion de Chio écrits un siècle plus tard, qui montrent Ismène encore vivante après la guerre des Sept, donc après la mort de Tydée, le premier l’opposant à Antigone dans le palais de Thèbes, le second l’unissant à Antigone dans un temple d’Héra non localisé - peut-être le temple d’Héra de Platée.


On déduit de ces deux points que la présence d’Ismène aux côtés d’Antigone pour défendre la mémoire de Polynice est une invention du Vème siècle av. J.-C. : ou bien Ismène est morte sous l’épée de Tydée et dans ce cas elle ne peut pas être encore en vie au moment des débats sur la mort de Polynice, ou bien elle n’est pas morte sous l’épée de Tydée et dans ce cas on comprend mal comment elle pourrait défendre la mémoire de celui qui a causé la mort de son amant Atys auquel, dans la Thébaïde de Stace, elle semble beaucoup plus attachée qu’Antigone ne l’est à son fiancé Hémon. Sans doute son insistance à détourner Antigone de son projet (en prétextant que Créon est trop puissant et qu’elle n’est qu’une faible femme : "Prends conscience d’abord que nous ne sommes que des femmes : la nature ne nous a pas faites pour lutter contre des hommes. Ensuite, nous sommes soumises à des maîtres, et dès lors contraintes d’observer leurs ordres, ceux là et de plus durs encore. Pour ma part, je supplie les morts sous la terre de m’être indulgents, puisque je cède à la force, mais j’entends obéir aux pouvoir établis", 61-67], en essayant de présenter le décret contre Polynice comme une volonté du peuple thébain ["Je ne méprise rien, simplement je me sens incapable d’agir contre le gré de ma cité", 78-79], en définissant la rébellion de sa sœur comme une folie égoïste ["A ton gré, pars. Mais sache au moment de partir que tu restes, en dépit de ta folie, justement chère à ceux qui te sont chers", 98-99]), au début de la pièce de Sophocle, est-elle la trace de cette hostilité à Polynice qu’on lui devine dans les versions antérieures au Vème siècle av. J.-C.

  

Personnages

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